Un acte d’Albéron de Chiny, évêque de Verdun, réformant radicalement l’abbaye Saint-Paul
« Au nom de la sainte et indivise Trinité. Moi Albéron, par la grâce de Dieu évêque de la sainte Église de Verdun, à tous ceux qui veulent vivre pieusement dans le Christ. “Voici que la vie qui est courte ne permet pas que le genre humain nourrisse de longues espérances” et que d’innombrables accidents et fins effrayantes conduisent l’âme exposée à ces dangers à s’efforcer par tous les moyens à stabiliser ses fluctuations en son Créateur. “Christ est en effet le degré suprême de la Loi, pour que tous ceux qui croient reçoivent la justice”, “car il nous faudra tous comparaître devant le tribunal de Christ, afin que chacun reçoive le salaire de ce qu’il a fait, en bien ou en mal, alors qu’il était en son propre corps”. C’est pour cette raison que, nous défiants de nos actes, poussés par la crainte de Dieu, désireux de gagner la vie éternelle à partir de la vie temporelle, nous avons décidé d’avoir recours au patronage de meilleurs que nous, afin d’œuvrer par les hauts mérites d’hommes sublimes au profit de ceux qui n’ont pas de vêtement contre la froidure. Car c’est une œuvre précieuse d’aimer les serviteurs de Dieu, et si nous ne pouvons pas encore Le servir parfaitement, d’honorer les pauvres du Christ, même si nous ne pouvons pas encore être ses pauvres.
C’est pourquoi, afin que le bien puisse persister jusqu’à la Fin, parce que nous désirons vivement être payés en retour par Dieu sans qu’il y ait de fin, nous nous sommes aussi efforcés de faire savoir à tous par ces lettres que, sur le conseil de bons hommes et avec l’accord de tout notre chapitre, nous avons décidé de placer en l’honneur de Dieu – lui qui est glorieux parmi ses saints – en l’abbaye Saint-Paul sise en faubourg de notre cité, des frères vivant selon la règle du bienheureux Augustin et en excuse de notre misère, eux aussi que cette calamité mutile et rend accusateurs en grand nombre cette action répréhensible. Après avoir éliminé l’insolence et l’irréligiosité des occupants de ladite abbaye, j’ai donc pris soin d’introniser des frères de l’abbaye de Prémontré qui de nos jours sont considérés être d’un caractère religieux éprouvé et digne de louange selon l’institution canoniale du bienheureux Augustin. C’est ainsi qu’il a été fait et confirmé par l’assemblée de toute notre Église, et c’est ainsi que par autorité épiscopale nous décidons établi à jamais que nul n’ose arracher de cette abbaye Saint-Paul de Verdun ledit ordre canonial selon les institutions et coutumes de l’abbaye de Prémontré, ni venir le troubler, ni y substituer des frères d’un autre ordre, et ce conformément au décret du vénérable pape Innocent II dont la lettre à l’abbaye de Prémontré contient notamment ceci : « nous décrétons, dit-il, que dans vos églises, dans lesquelles les frères vivent en profès la vie canoniale, il ne soit permis à quiconque de changer en aucune manière l’ordo qui y a été établi selon la règle du bienheureux Augustin. Qu’aucun évêque des temps à venir n’ose expulser de vos églises les frères de ce même ordre, et que personne ayant fait canoniquement profession n’ose quitter ces mêmes églises ou cloîtres sans la permission de toute la communauté, et qu’en cas de départ aucun évêque, aucun abbé, aucun moine n’ose le recevoir sans garantie portée par une lettre ». Ce que donc nous avons fait avec une pieuse intention, pour que ce ne soit pas perturbé dans les temps à venir par la malice des envieux, y pourvoyant par la paix ecclésiastique et la sérénité de la vie religieuse, nous le confirmons sous anathème perpétuel par l’apposition de notre sceau et la souscription canonique de témoins idoines.
Seing de moi-même, Albéron, évêque de Verdun. Seing de Guillaume, doyen. Seing d’Albert, princier. Seing d’André, archidiacre. Seing de Richard, archidiacre. Seing de Jean, archidiacre. Seing de Richer, archidiacre. Seing d’Étienne, chantre. Seing de Hugues, trésorier. Seing de Thédouin, prêtre. Seing de Rohard, prêtre. Seing de Salomon, prêtre. Seing de Eudes, diacre. Seing de Thierry, diacre. Seing de Godefroid, sous-diacre. Seing de Guéry, sous-diacre. Seing de Pierre, sous-diacre. Seing de Jean, sous-diacre. Seing de Émelin, chapelain.
Fait à Verdun le IV des calendes de décembre, en l’an du Verbe incarné 1135, 13e indiction, épactes 15, concurrents [ ], la cinquième année de l’ordination du vénérable Albéron évêque de Verdun, sous la gouvernance de Lothaire Auguste et Patrice.
Moi, Herbert, chancelier, j’ai révisé ».
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En ce début de deuxième tiers du XIIe siècle, Albéron de Chiny, évêque de Verdun depuis tout juste un peu plus de quatre ans (il a été consacré à Paris par le pape Innocent II, le dimanche de Pâques 19 avril 1131), opère une transformation radicale du paysage religieux de sa cité : l’expulsion des moines bénédictins qui, depuis un peu plus d’un siècle et demi, occupaient l’abbaye Saint-Paul pour les remplacer par des chanoines réguliers de l’ordre de Prémontré. C’est une décision longuement soupesée et mûrement réfléchie qu’il fait connaître par cette charte. C’est aussi une action qui a dépassé le cadre strict de son diocèse par le retentissement qu’elle a eu et les remous qu’elle a suscités, l’évêque ayant été directement interpellé et critiqué, notamment dans le monde bénédictin. La charte qu’il promulgue le 28 novembre 1135 apparaît ainsi comme une explication, on pourrait même presque dire un plaidoyer pro domo où il énonce et justifie les raisons qui l’ont déterminé à agir ainsi qu’il l’a fait.
Une analyse du texte
Après une invocation trinitaire classique, l’intitulation « évêque de la sainte Église de Verdun » est à souligner car elle se rencontre environ vingt-cinq fois dans les actes épiscopaux verdunois, surtout entre le milieu du XIe et le milieu du XIIe siècle (ce type d’intitulation épiscopale se trouve moins d’une vingtaine de fois à Metz, alors qu’à Toul il est beaucoup plus rare, seulement quatre fois). Puis l’adresse, toute banale qu’elle soit dans une première approche, apporte de fait un premier élément, certes par antonymie, dans la vive controverse qui a opposé deux camps, d’une part l’évêque, son chapitre et les autres établissements religieux de Verdun, à d’autre part l’abbé et les moines de Saint-Paul. Son raisonnement sous-tend en effet qu’en ce bas monde ne se trouvent pas uniquement des gens « désireux de vivre pieusement », mais qu’il en est aussi qui se sont écartés de ce droit chemin. Cette finalité de vie conforme à la piété, va ainsi constituer une sorte de trame de fond à sa charte.
Le préambule qui vient ensuite s’ouvre directement par une citation. Examiner les citations dans une charte médiévale s’avère aussi une manière d’aborder la question des préambules. En effet, la citation ne saurait être isolée de son contexte, pas plus que du contexte dans lequel le préambule lui-même s’inscrit. Longtemps le préambule a été considéré comme porteur de « considérations générales et souvent banales, sans lien bien direct avec l’objet de l’acte » (Giry 1894, p. 539), sans rapport réel avec son contenu juridique ; cette conception n’est plus de mise depuis longtemps et on peut souvent établir le constat que, si certes le préambule introduit l’acte par des considérations générales, c’est aussi afin d’en légitimer le contenu, la citation étant censée venir étayer et renforcer le discours. Dans le cas présent, que veut signifier l’évêque et comment s’y prend-il ?
La citation qui débute le préambule est non pas extraite de la Bible – comme on aurait naturellement tendance à s’y attendre –, mais d’un auteur latin profane. Dans l’ensemble des actes des évêques de Verdun, les citations sont assez fréquentes, concernant globalement un peu plus du quart des actes, leur écrasante majorité étant d’essence religieuse et seulement quelques-unes d’auteurs profanes. Sur seize citations que comportent les préambules des actes d’Albéron de Chiny, deux proviennent d’Horace, à chaque fois d’ailleurs pour cette même question de l’abbaye Saint-Paul. La phrase des Odes qui ouvre ici le préambule indique que « la brièveté de la vie ne permet pas de longues espérances », ce qui implique qu’il est donc urgent d’agir ; le texte se poursuit pour rappeler que tout être doit affronter dangers et tentations, sans oublier qu’à la fin, il devra comparaître devant le tribunal du Christ, où il sera jugé selon le mal ou le bien qu’il a fait, le Christ étant le souverain juge, comme vient le rappeler la citation de l’apôtre Paul (II Co 5, 10). En arrière-plan, on comprend qu’à l’abbaye Saint-Paul, l’abbé et les moines ont succombé aux tentations et qu’ils seront jugés selon ce qu’ils ont accompli, tant en bien que surtout en mal. Ce préambule met ainsi en exergue le mal et plus encore le mal qu’il convient de corriger ; il constitue une sorte de rappel catéchétique, et les sous-entendus qu’il comporte sont annonciateurs de la décision qui a été prise et que l’évêque annonce. Il a de fait une fonction argumentative, une volonté de convaincre et d’instruire ; il revêt en outre un aspect absolument particulier dans l’ensemble des autres préambules de cet évêque. Il est vrai aussi que l’affaire dont il est question est loin d’être banale. C’est même un cas unique !
Le texte nous dit donc que, pour chacun, il y a urgence à agir, et en l’occurrence qu’il en est de même pour lui, l’évêque, afin plus spécialement de régler la situation de l’abbaye Saint-Paul qui traîne depuis un certain temps. Mais avant d’annoncer la disposition qui a été prise, il n’oublie pas de rappeler, dans l’exposé qui suit le préambule, que c’est une décision collective, car il a veillé à consulter son chapitre ainsi que des personnalités (« le patronage des meilleurs », « d’hommes sublimes ») dans son entourage immédiat, mais aussi bien au-delà. On sait ainsi qu’il a demandé à Bernard de Clairvaux de lui envoyer des moines cisterciens et que celui-ci, son ordre ne souhaitant pas s’établir en zone urbaine, lui a conseillé de s’adresser à l’abbé de Prémontré. L’exposé se clôt sur la nécessité « d’honorer les pauvres du Christ », c’est-à-dire ceux qui vivent pieusement à l’inverse de ceux qui ont choisi le lucre et la luxure.
Vient alors le dispositif. Ayant éliminé « l’insolence et l’irréligiosité » des moines, appel a donc été fait à « des frères de l’abbaye de Prémontré […] au caractère religieux éprouvé et digne de louange ». Et, en clauses finales, est donné un extrait d’une lettre du pape Innocent II à Prémontré.
Cet acte a pour témoins tous les dignitaires du diocèse et du chapitre cathédral. Il convient d’ailleurs de souligner que leur souscription est qualifiée de canonique, c’est-à-dire effectuée conformément au droit de l’Église et sans doute aussi des codes de la diplomatique en usage dans la chancellerie épiscopale verdunoise. On note toutefois l’absence des abbés verdunois bénédictins de Saint-Vanne et Saint-Airy (qui avaient vainement formé le vœu de pouvoir reprendre l’abbaye Saint-Paul). Le seing ou signum des dignitaires mentionnés vient ici apporter leur témoignage non seulement sur la charte en tant que document matériel, mais aussi à la teneur même de la charte.
Cet acte se termine par la formule classique de recognition du chancelier qui, ce faisant, opère une action strictement diplomatique, c’est-à-dire le contrôle de l’acte après sa réalisation et avant sa promulgation officielle.
Le contexte de cet acte
Cet acte est le résultat d’un processus qui remonte manifestement à près d’une dizaine d’années, à une époque où la cité de Verdun traversa une série de difficultés (avec la fin de la Querelle des Investitures, la démission de l’évêque Henri Ier, ancien archidiacre de Winchester), période pendant laquelle l’abbaye Saint-Paul s’octroya apparemment quelques libertés fort peu canoniques. On peut même penser que cela fut l’un des éléments incitant le nouvel évêque élu de Verdun (en 1129), Ursion, abbé de Saint-Denis de Reims, à remettre sa démission au pape Innocent II et à l’empereur Lothaire III, à Liège, au début du carême 1131. Le nouvel évêque de Verdun, Albéron de Chiny, n’a pu immédiatement s’occuper de la situation de Saint-Paul qui malgré de nombreuses et vaines tentatives ne cessait de se détériorer, mobilisé qu’il a été en premier lieu par sa lutte contre l’avoué, le comte Renaud de Bar qui rançonnait la ville, et la dépréciation de la monnaie verdunoise qu’il a choisi de remplacer en 1132 par le denier châlonnais. Par deux fois le clergé verdunois se réunit en assemblée pour tenter de faire venir à résipiscence l’abbé de Saint-Paul mais, malgré également les admonestations de maintes personnes, celui-ci persista dans son comportement.
Le témoignage d’un contemporain
Un moine de Saint-Vanne dénommé Laurent de Liège, auteur de la continuation des Gesta episcoporum Virdunensium qu’il arrête en 1144, nous rapporte qu’il y a eu un long processus de – malheureusement vaines – tentatives de retour à une conformité de vie religieuse : « l’abbaye du bienheureux Paul – écrit-il – était alors entachée, déchirée, lacérée et mise en pièces, elle à qui les fils de Bélial qui l’habitaient, avaient arraché la terre et tous ses biens. Je suis même horrifié de dire le nombre de tentations auxquelles ils s’étaient asservis, que de manière criminelle, nuit et jour, ils s’avilissaient par leurs façons, comment les moines profès ne se révélaient pas du tout fermes en vie cénobitique, mais de très odieux sarabaïtes et gyrovagues, déshonneur de notre saint ordre. Que mentionner encore ? Combien de fois des abbés et d’autres hommes très fervents en discipline monastique, désignés par d’autres abbayes pour les corriger par l’intermédiaire de l’évêque, ont dû reculer face à ces groupes pestilentiels, ayant été par eux, soit frappés soit provoqués à toute amertume ? Combien de fois les meneurs de leur débauche ont été avertis, réprimandés et même emprisonnés ? Après chaque promesse de se corriger, ne se sont-ils pas ensuite à nouveau précipités dans de plus grandes abominations entraînant avec eux tout le troupeau de leurs congénères ? De là vient que l’évêque, fidèle cultivateur de la vigne ecclésiastique, cette plantation dégénérée et desséchée, après non pas trois ans, mais après de nombreuses fois trois ans, après de multiples labours de réprimandes, après toutes sortes de corbeilles d’excréments, [engrais] de brûlantes exhortations, parce qu’elle ne montrait aucun espoir de porter fruit, pour ne plus occuper la terre qu’elle possédait, il l’extirpa avec le glaive de la castration, et y greffa une vigne nouvelle, celle des clercs de l’ordre monastique, qui désormais germe comme au paradis de Dieu, ceux que Norbert, archevêque de Magdebourg, grand homme d’Église, lui avait délégué parmi les maîtres de son ordre » (Laurent de Liège, § 32, p. 510).
Cette affaire n’a pas reçu que des approbations, les critiques et récriminations ont été vives dans le monde des moines noirs, à commencer par l’abbé de Cluny, Pierre le Vénérable, qui s’en plaignit dans une diatribe qu’il adressa au légat pontifical Mathieu d’Albano pour dénoncer la violence faite à l’ordre bénédictin à Verdun. Néanmoins cette décision avait été confirmée par diplôme de l’empereur Lothaire III, donné à Spire le 8 janvier 1136 à la demande de l’évêque de Verdun qui y apposa son signum, puis, douze jours plus tard, le 20 janvier 1136, par une charte d’Albéron de Montreuil, archevêque de Trèves. C’est sans doute aussi en réponse aux critiques qui continuaient à circuler qu’au cours de l’année 1136, Albéron écrivit à Innocent II pour lui expliquer les raisons qui l’avaient poussé à mettre des chanoines réguliers de l’ordre de Prémontré à la place des moines de Saint-Paul qu’il accuse d’avoir dispersé les biens de l’abbaye et de vivre de manière luxueuse : « déplorant la destruction excessive de cette abbaye, parce qu’elle avait grand renom depuis les temps anciens, j’ai d’abord rencontré seul l’abbé de ce lieu, ensuite avec les autres abbés (de l’ordre de Clairvaux : les abbés de Trois-Fontaines et de La Chalade) et religieux, je lui ai présenté de nombreux points […], de sorte que je l’ai exhorté paternellement à se réprimander lui-même et ses moines, et à reformer la vie religieuse dans son abbaye. Bien qu’il ait promis qu’il ferait tout ce que je voulais pour l’amour de Dieu et du nôtre, mais comme “l’argile qui a été une fois imprégnée par un parfum, le garde longtemps” (Horace, Épitres, I, II, 69), au lieu de corriger ce qu’il avait fait de mal, il augmentait chaque jour son infamie, […] refusant de faire ce qu’il avait promis ». L’évêque précise qu’en outre l’abbé de Saint-Paul étant vicaire épiscopal, cette charge convient mieux à des clercs tels que sont les chanoines de Prémontré. La réponse d’Innocent II, le 25 avril 1137, consacra la venue des prémontrés, même si cela fut difficile à accepter pour les bénédictins verdunois. Ainsi que l’écrivit Laurent de Liège, « pour la paix de tous, je dirais que, pour ne pas parler des autres choses, je juge des plus graves l’abandon de la vie monastique qui y a été fait, bien que je sache qu’aucune autre voie n’était ouverte au très digne prélat pour le redressement dudit monastère ; qu’aussi l’abbé Laurent [de Saint-Vanne]et tous les religieux de notre profession monastique avaient reculé devant la reprise en charge dudit monastère comme le proposait l’évêque. C’est pourquoi je dois nécessairement aussi louer la vigilance de l’habile pontife car, avec tous les fidèles, nous sommes un dans le Christ, surtout que la majesté impériale et le siège apostolique ont ordonné que cela se fasse ainsi pour la correction des maux, et les abbés de cet ordre de clercs ont amélioré cette abbaye en toutes choses, et ont recouvré par leurs grands soins tout ce qui avait été dilapidé par eux, à tel point que, là où alors il y avait à peine vingt, non pas des moines, mais des sarabaïtes, vivent maintenant honorablement près de trois cents serviteurs de Dieu ».
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Édition du texte latin de l’acte
1135, 28 novembre. – Verdun.
A. Original sur parchemin, larg. 361 × haut. 461/446 mm (dont repli 52 mm défait), jadis scellé par sceau appendu (double incision au centre du repli), BnF, ms. lat.17121 (pièce no 1).
B. Copie dans le cartulaire de Saint-Paul (XIIIe siècle), Bibliothèque municipale de Verdun, ms. 751, p. 79-80, sous la rubrique : « Institutio ordinis premonstratensis in ecclesia ista ab Alberone episcopo ».
a. C.-L. Hugo, Sacri et canonici ordinis Praemonstratensis annales, in duas partes divisi, t. II, Nancy, Cusson, 1735, Pr., col. 325-326. – b. Dom A. Calmet, Histoire de Lorraine, 1e éd., t. II, Nancy, Cusson, 1728, Pr., col. CCCVII ; 2èmeéd. t. V, Nancy, A. Leseure, 1752, Pr., col. CXCVI.
Ind. L. Clouët, Histoire de Verdun, t. II, Verdun, Charles Laurent, 1868, p. 220-222. – A. Lesort, Chronique et chartes de l’abbaye de Saint-Mihiel, Mettensia VI, Paris, Klincksieck, 1909-1912, p. 270, n. 2. – M. Parisse, « Les chanoines réguliers en Lorraine, Fondations, expansion (xie-xiie siècle) », Annales de l’Est, 1968, no 4, p. 364.
|1| (†) in nomine sancte et individuĘ trinitatis. Ego Albero, Dei gratia sanctę Virdunensis ęcclesię episcopus, omnibus in Christo pie vivere |2| volentibus. « Ecce vita brevis, spem inchoare longam genus humanum vetat », et casus innumeri finisque timendus animam periculis expositam ad hoc |3| erudiendo conducunt ut fluctuationem suam in creatore suo stabilire omnimodis studeat. « Finis enim legis, Christus, ad justitiam omni creden-|4|-ti » « ante cujus tribunal, testante apostolo, omnes nos manifestari oportet ut recipiat unusquisque propria corporis, prout gessit sive bonum, sive malum ». |5| Propter hoc de meritis nostris diffidentes, divino timore conducti, de temporali vita lucrari ęternam vitam desiderantes, ad meliorum quam nos simus |6| patrocinia confugere consilium duximus ut quibus vestimentum non est in frigore celsis meritis sublimium virorum operiamur. Est enim |7| opere precium amare servos Dei, et si necdum ei perfecte servire possumus, honorare pauperes Christi, quamvis ejus necdum pauperes esse valemus.
|8| Itaque ut usque in finem bonum permaneat, quod sine fine a Deo nobis renumerari exoptamus, etiam litteris ad notitiam omnium adsignare studuimus, |9| quod bonorum virorum consilio et totius capituli nostri consensu, fratres secundum regulam beati Augustini viventes in ęcclesia Sancti Pauli, quę sita est in suburbio |10| nostrę civitatis, ponere diffinivimus ad honorem Dei, qui gloriosus est in sanctis suis, et ad nostrę misere excusationem quos et calamitas ista debilitat |11| et reproba actio frequenter accusat. Igitur fratres Premonstratensis ęcclesię qui temporibus nostris spectatę et laudabilis religionis esse videbantur, |12| secundum canonicum beati Augustini institutum, eliminata insolentia et irriligiositate habitantium predictę ęcclesię, intronizare curavi. |13| Sic itaque actum est et a totius ęcclesię nostrę conventu firmatum, et sic ratum episcopali auctoritate in perpetuum esse censemus, ut nullus canonicum ordinem predictum |14|secundum instituta et mores Premonstratensis ęcclesie ab illa Sancti Pauli Virdunensis ęcclesia convellere, vel in ipsa inquietare, vel alterius ordinis fratres |15| subrogare audeat, sequuti decretum Innocentii venerabilis papę secundi, cujus extat epistola ad Premonstratensem ęcclesiam inter alia etiam hoc continens : |16| « statuimus, inquit, ut in ęcclesiis vestris, in quibus fratres canonicam vitam professi degunt, nulli omnimodo homini liceat secundum beati Augustuni regulam |17| ibidem constitutum ordinem commutare. Nullus etiam episcoporum futuris temporibus audeat ejusdem religionis fratres de ęcclesiis vestris expellere nec pro-|18|-fessionis canonicę quisppiam ex eisdem ęcclesiis aut claustris audeat sine communi congregationis permissione discedere, discedentem vero nullus |19| episcoporum, nullus abbatum, nullus monachorum sine communi cautione litterarum suscipere ». Igitur quod a nobis pia intentione factum est, ne futuris temporibus invidorum |20| fraude conturbetur, ęcclesiasticę paci et religionis serenitati providentes, sigilli nostri impressione et testium idoneorum canonica subscriptione sub |21| anathemate perpetuo confirmamus.
Signum mei ipsius Alberonis, Virdunensis episcopi. Signum Willelmi, decani. Signum Alberti, primicerii. Signum An-|22|-dreę, archidiaconi. Signum Richardi, archidiaconi. Signum Johannis, archidiaconi. Signum Richeri, archidiaconi. Signum Stephani, cantoris. Signum Hugonis, thesaurarii. Signum Theduini, sacerdo-|23|-tis. Signum Rohardi sacerdotis. Signum Salomonis sacerdotis. Signum Odonis, diaconi. Signum Theoderici, diaconi. Signum Godefridi, subdiaconi. Signum Wirici subdiaconi. Signum Petri, subdiaconi. Signum Johannis, |24| subdiaconi. Signum Emelini, capellani.
Actum Virduni, IIII kl decembris, anno incarnati verbi Mo Co XXXVo, indictione XIIIa, epacta XVa, concurrente [ ](a), |25| anno Vto ordinationis Alberonis venerabilis Virdunensis episcopi, imperante Lothario augusto et patritio.
Ego Herbertus cancellarius recognovi.
(a) Sur l’original, le mot concurr a été manifestement noté après coup, avec une encre nettement plus claire, comme si le scribe avait souhaité compléter l’espace de fin de ligne resté libre tout en laissant un petit espace en blanc afin de pouvoir noter le chiffre du concurrentqui n’a jamais été porté, et qui aurait dû être III.
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Sources et bibliographie complémentaire
Giry A. (1894), Manuel de diplomatique, Paris, Hachette, p. 539.
Évrard J.-P. et Renault J.-B. (à paraître), « Les citations dans les actes des évêques de Metz et de Verdun :essai d’étude comparative », in À propos des actes épiscopaux. Nouvelles approches et nouveaux regards (Xe-XIIIe siècles), G. Combalbert et C. Senséby (dir.), Caen, Presses universitaires de Caen.
Laurent de Liège, Gesta episcoporum Virdunensium, MGH, SS, t. X, 1852, p. 489-529.
Image d’illustration : BnF, ms. lat. 17121 (1).

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Jean-Pol EVRARD (28 août 2024). Un acte d’Albéron de Chiny, évêque de Verdun, réformant radicalement l’abbaye Saint-Paul. ACTÉPI. Consulté le 12 juillet 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/127ee